LE BAL DES PHILOSOPHES – SOCRATE VS CALICLÈS

LE BAL DES PHILOSOPHES – SOCRATE VS CALICLÈS

Présenté par Martin LEGROS

Piano : Pierre-François BLANCHARD

La philosophie, ce ne sont pas seulement des idées et des concepts en pagaille, c’est une succession ininterrompue de débats où les grands penseurs s’opposent frontalement, à coup d’arguments, d’exemples… et parfois de mauvaise foi. 

Après avoir parcouru les grands concepts de l’histoire de la philosophie, nous nous intéresserons dans cette nouvelle saison du Bal des philosophes, aux grandes disputes philosophiques. 

30/9 Existe-t-il un droit de mentir ? (Emmanuel Kant vs Benjamin Constant)

14/10 Y a-t-il une raison du plus fort ? (Socrate vs Calliclès)  

25/11 L’homme est-il naturellement bon… ou méchant ? (Jean-Jacques Rousseau vs Thomas Hobbes) 

9/12 Les femmes vont-elles rendre les hommes meilleurs ? (Simone de Beauvoir vs Arthur Schopenhauer) 

27/1 La vérité, invention ou découverte ? (Nietzsche vs Platon) 

10/3 L’âme est-elle dissociée du corps ? (Descartes vs Merleau-Ponty) 

7/4 Avons-nous des devoirs vis-à-vis de nous-mêmes ? (Simone Weil vs Ruwen Ogien) 

À chaque fois, nous referons le match, texte en main. Car la pensée a besoin de confrontation pour mettre au clair ses raisons. 

 

Philosophe et journaliste, Martin Legros est rédacteur en chef de Philosophie magazine et de Philomag.comIl est l’auteur de Pantopie (Le Pommier), entretiens avec Michel Serres et de Que faire ? Dialogue entre Alain Badiou et Marcel Gauchet (Philosophie magazine Editions), il dirige la collection 20 Penseurs (Philosophie magazine Editeur).

 

Socrate vs Calliclès : « Y -a-t-il une raison du plus fort ? » 

Texte : Platon, Gorgias, (483a -488c) (trad. Emile Chambry)

CALLICLÈS

« Selon moi, les lois sont faites pour les faibles et par le grand nombre. C’est pour eux et dans leur intérêt qu’ils les font et qu’ils distribuent les éloges ou les blâmes ; et, pour effrayer les plus forts, ceux qui sont capables d’avoir l’avantage sur eux, pour les empêcher d’obtenir, ils disent qu’il est honteux et injuste d’ambitionner plus que sa part et que c’est en cela que consiste l’injustice, à vouloir posséder plus que les autres ; quant à eux, j’imagine qu’ils se contentent d’être sur le pied d’égalité avec ceux qui valent mieux qu’eux. 

XXXIX.- Voilà pourquoi, dans l’ordre de la loi, on déclare injuste et laide l’ambition d’avoir plus que le commun des hommes, et c’est ce qu’on appelle injustice. Mais je vois que la nature elle-même proclame qu’il est juste que le meilleur ait plus que le pire et le plus puissant que le plus faible. Elle nous montre par mille exemples qu’il en est ainsi et que non seulement dans le monde animal, mais encore dans le genre humain, dans les cités et les races entières, on a jugé que la justice voulait que le plus fort commandât au moins fort et fût mieux partagé que lui. De quel droit, en effet, Xerxès porta-t-il la guerre en Grèce et son père en Scythie, sans parler d’une infinité d’autres exemples du même genre qu’on pourrait citer ? Mais ces gens-là, je pense, agissent selon la nature du droit et, par Zeus, selon la loi de la nature, mais non peut-être selon la loi établie par les hommes. Nous formons les meilleurs et les plus forts d’entre nous, que nous prenons en bas âge, comme des lionceaux, pour les asservir par des enchantements et des prestiges, en leur disant qu’il faut respecter l’égalité et que c’est en cela que consistent le beau et le juste. Mais qu’il paraisse un homme d’une nature assez forte pour secouer et briser ces entraves et s’en échapper, je suis sûr que, foulant aux pieds nos écrits, nos prestiges, nos incantations et toutes les lois contraires à la nature, il se révoltera, et que nous verrons apparaître notre maître dans cet homme qui était notre esclave ; et alors le droit de la nature brillera dans tout son éclat. » (483 a -484 b)

SOCRATE

« Mais reprenons les choses au commencement : qu’entendezvous, Pindare et toi, par la justice selon la nature ? Estce le droit qu’aurait le plus puissant de prendre par force les biens du plus faible, ou le meilleur de commander au moins bon, ou celui qui vaut plus d’avoir plus que celui qui vaut moins ? Te faistu de la justice une autre idée, ou ma mémoire estelle fidèle ?

CALLICLÈS

Oui, c’est cela que j’ai dit alors et que je dis encore.

SOCRATE

Mais estce le même homme que tu appelles meilleur et plus puissant ? Je n’ai pas su comprendre alors ce que tu voulais dire. Estce les plus forts que tu appelles meilleurs et fautil que les plus faibles obéissent au plus fort, comme tu l’as laissé entendre, je crois, en disant que les grands États attaquent les petits en vertu du droit naturel, parce qu’ils sont plus puissants et plus forts, ce qui suppose que plus puissant, plus fort et meilleur, c’est la même chose, ou bien se peutil qu’on soit meilleur, tout en étant plus petit et plus faible, et qu’on soit plus puissant, tout en étant plus mauvais ? Ou bien la définition du meilleur et du plus puissant estelle la même ? C’est cela même que je te prie de définir en termes précis : y atil identité ou différence entre plus puissant, meilleur et plus fort ? » 

(487 c – 488c)

Conférence

Infos

  • 14 octobre 2025
  • mardi, 19:00 à 20:30

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